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Les morts, le survivant et les vivants : tradition, transmission, trahison

Laurent VANNINI

[Publication en ligne : 21 décembre 2020]

Résumé : I Am Legend est un roman de Richard Matheson publié en 1954. Mathe-son y dresse le portrait d’un homme blanc, Robert Neville, seul survivant d’une épidémie vampirique affectant l’humanité entière. Le roman a souvent fait l’objet d’analyses aca-démiques qui soulignaient la critique portée par Matheson contre le conservatisme de l’homme « de l’organisation », l’aliénation consumériste et la rationalisation scientifique des années cinquante, ou plus largement encore la conception de la « normalité ». J’avancerai dans cette analyse que si Robert Neville est une représentation glaçante de l’homme de l’organisation blanc américain et suburbain de l’Amérique des années cin-quante, il est également un double survivant, d’une guerre passée qu’il a vécu empiri-quement comme soldat et des conséquences catastrophiques au présent d’une guerre dont la portée est apocalyptique. C’est dans l’enchevêtrement de ces dimensions fiction-nelles, que se révèle la force singulière du roman, c’est-à-dire la tentative de transmission d’un savoir dont l’oubli par l’homme a engendré sa propre destruction : l’origine du mal n’est autre que l’homme lui-même

Mots-clés : apocalypse nucléaire, vampires, transmission, fantastique, Matheson, trahi-son.

Abstract : I Am Legend is a novel written par Richard Matheson in 1954. The author depicts the day-to-day experience of the sole survivor of a worldwide vampire epidemic, Robert Neville, a white middle-class American man. The novel has often been analyzed by academic researchers as an expression of Matheson’s critical views on conservatism, consumerist alienation and scientific rationalization of the 1950s, as well as on a broader conception of “normality”. I will suggest in this paper that if Neville stands as a chilling picture of the white suburban and organization man of the 1950s in the United States, he is also and foremost a double survivor ; first, of a past war, experienced as a soldier a long time ago, and second, of the current apocalyptic consequences of another distant war which has just ended. The sheer singularity of the novel lies in the interlacing of these fictional dimensions, as the author tries to transmit a knowledge man cast into oblivion a long time ago, hence begetting his own destruction : The only cause of evil in the world is man himself.

Keywords : nuclear apocalypse, vampires, transmission, fantasy, Matheson, treason.

Pour citer cet article : Laurent Vannini « Les morts, le survivant et les vivants : tradition, transmission, trahison », Récits et représentations d’apocalypses , Frédéric Le Blay & Paul-André Claudel (dir.), Atlantide, n° 11, 2020, p. 96-116, http://atlantide.univ-nantes.fr